Développement nearshore IT et conjoncture dégradée

paysage de roumanie
27 juin 2019

Ces derniers temps, le FMI, l‘OCDE et consort revoient régulièrement à la baisse les prévisions de croissance mondiale, ainsi que celles concernant commerce international, dans un contexte de quasi guerre commerciale.

Les USA multiplient les taxes contre les produits chinois, mais également les interdictions d’exportation de composants électroniques de haute technologie vers l’empire du milieu.

L’UE, qu’on nous annonçait comme Puissance au moment du vote du traité de Maastricht, n’est écoutée au plan mondial sur quasiment rien, comme on le voit à la veille du G20. Tout au plus est elle libre de brider son développement économique déjà très poussif en taxant de manière peu cohérente certains de ses polueurs, sans que les autres continents, qui polluent souvent bien davantage, ne se sentent réellement engagés.

Si on ajoute les très fortes tensions dans le golfe persique, entre les USA + alliés et l’Iran, et une rapide montée de l’or qui ne saurait être de bonne augure, les nuages s’accumulent à l’horizon…

Dans un contexte de ralentissement économique global, l’Italie est en récession, et l’Allemagne n’a quasiment plus de croissance. l’Italie acculée projette d’introduire une monnaie parallèle, type mini bonds, au grand scandale de l’Allemagne à laquelle elle doit plus de 900 milliards d’Euro vie la système Target… bref l’heure des choix fondamentaux approche

Une UE faible et vassalisée

Il est de plus en plus clair que les USA veulent utiliser leur poids politique et militaire pour favoriser leurs entreprises, et regagner des parts de marché perdues.

Concrètement, l’UE, pourtant allié fidèle (mais qui ne pays pas le prix complet de sa défense) se voit interdite par le “grand frère” d’acheter des téléphones chinois, d’honorer leurs engagements commerciaux avec l’Iran, Cuba, voire le Venezuela.

Pour ce qui est de pouvoir commercer avec la Russie, c’est aussi largement exclu à cause de sanctions américaines. Du coup les russes achètent les produits agro-alimentaires nécessaires auprès des Brics, ou de plus en plus les produisent eux même, en substituant leur propre production à l’importation.

Au niveau énergétique aussi, la construction de nouveaux pipe-line gaziers (évitant la conflictuelle Ukraine) pour approvisionner l’Europe de l’Ouest en gaz russe est vertement critiqués par les USA qui font tout pour écouler leur gaz de schiste, momentanément abondant… L’Allemagne est de fait régulièrement sommée d’acheter des hydrocarbures à son « protecteur » américain.

Une UE divisée à la direction peu légitime

En février 2019, un centre de recherche allemand a publié une étude sur les effets de l’Euro, et ont voit clairement qu’il a clairement enrichi l’Europe du Nord, au détriment des pays d’Europe du Sud qui s’en sont trouvés sensiblement appauvris.

L’analyste financier Gavekal est d’ailleurs parvenu aux mêmes conclusions, avec une méthodologie assez différente, ce qui corrobore ces enseignements.

Dans un tel contexte de fort déséquilibre des échanges intra-européens, il n’est pas surprenant que les tensions entre les pays de l’UE soient en forte hausse, de même que les tendances centrifuges, comme le montre la progression des souverainistes aux dernières élections européennes.

Vague souverainiste qui touche tout spécialement les grands pays, Royaume Uni, France, Italie, Allemagne dans une moindre mesure, ou des pays qui ont connu un joug communisme soviétique très dur ; Pologne, Hongrie et Tchéquie.

En fait les nouveaux députés au parlement européens auront peu leur mot à dire, le véritable centre de pouvoir étant la commission européenne, dont les commissaires (pourquoi avoir choisi des noms d’aussi sinistre mémoire?) sont nommés, et non élus.

Pire cette commission est souvent dirigée par des anciens battus aux élections dans leur propre pays ; JM Barroso, dont le pantouflage chez Goldman a aussi fait scandale, mais qui n’a rien voulu entendre, le très vindicatif Guy Verofstat, ou encore le titubant suprême JC Junker.

Au niveau du président du conseil européen, on peut citer Donald Tusk dont le gouvernement fraîchement élu de son pays d’origine ne voulait à aucun prix… en vain…

Et ces derniers jours, les chosent semblent encore empirer, puisque le candidat allemand à la succession de JC Junker n’a pas pu être élu à temps, il n’y a toujours aucun accord sur le nom d’un candidat, ce qui pousse le camarade junker à rester pour les arrêts de jeu…

Ceci dans un contexte ou côté Britannique, le pro Brexit dur Boris Johnson est bien placé pour devenir premier ministre…

D’ailleurs quelle légitimité pour ces quasi fonctionnaires européens face à un Trump qui vient de déclarer publiquement « je m’en fous des européens » et qui malgré toutes ses outrances a été élu président des Etats-Unis, se bat pour réaliser son programme et pour se faire réélire…

Tirer la logique de la constitution des blocs en cours

Pour ceux qui prennent un peu de recul, il est clair que des blocs régionaux, en gestation auparavant, notamment une zone Yuan en Asie, sont en train de se renforcer. La Russie travaille aussi sur sa zone d’influence. Et par contrecoup les USA « bétonnent » plus que jamais leur arrière cour américaine ; antagonismes face à Cuba, au Nicaragua et au Venezuela, proximité avec la Colombie, rapprochement rapide avec le Brésil.

Face à cela, l’Europe doit tirer les conclusions qui s’imposent et davantage exister par elle même, au moins au niveau commercial et des projets communs.

Ceci implique assurément de repenser l’Euro pour le rendre plus durable.

Et Cela implique aussi d’aller encore plus loin dans la division des taches qui a commencé à se mettre en place depuis l’élargissement de 2004 – 2007. Or que voit on aujourd’hui ?

Le potentiel principal reste à l’Est

On ne peut pas ignorer le défi démographique, qui est grosso modo général dans l’ensemble de l’Europe, mais qui peut être accentué par le souhait de beaucoup de ces pays de rester culturellement assez homogènes.

La Pologne a cependant une approche intéressante en acceptant de recruter largement des salariés d’origine ukrainienne. La Hongrie donne elle généreusement des passeports aux membres des minorités hongroises hors du pays, tandis que la Roumanie fait de même avec les moldaves roumanophones de République de Moldavie.

Au niveau strictement économique, les PECO (pays d’Europe Centrale et Orientale) trustent les podiums des meilleures croissances au cours de ces dernières années. Certes ils avaient un vrai retard à rattraper, mais justement, ils ont encore un potentiel de croissance supérieur aux pays d’Europe de l’Ouest qui flirtent avec la stagnation.

Il y a donc un intérêt à investir à l’Est, à la fois pour exporter car les coûts restent plus faible, mais aussi de plus en plus pour servir les marchés nationaux en croissance. On gagne ainsi sur les deux tableaux. Sans oublier l’intérêt de fixer sur place des populations est-européennes pour éviter qu’elles ne partent en Europe de l’Ouest ouùle chômage est déjà beaucoup plus élevé.

Il est plus facile de passer au nearshore qu’à l’offshore

L’offshore est souvent la première solution envisagée voire testée par les entreprises, mais cette option n’est pas forcément réaliste. Ainsi une entreprise française nous a fait promettre au démarrage de son projet, de ne surtout pas sous traiter du travail en Inde, ayant eu trop de difficultés avec ce pays. Et nous avons par ailleurs récupéré un beau projet, non abouti, pour lequel le client nous a expliqué qu’il avait auparavant travaillé avec des «hindous » 😉

En fait l’offshore représente un très gros défi au niveau communication. Beaucoup d’incompréhensions peuvent apparaître, mais elle ne sont pas forcément dépistées, ce qui fait les les problèmes empirent rapidement.

La distance et les décalages horaires aggravent encore les difficultés.

Enfin il y a aussi des problèmes culturels, le oui d’un asiatique ne veut pas forcément dire la même chose que le oui d’un européen… et l’anglais d’un indien n’est pas forcément identique à l’anglais d’un français ou d’un belge…

Au final, le nearshore intra-européen apparait comme une solution de compromis performante ;

Les coûts sont sensiblement réduits par rapport aux coûts des grandes villes occidentales,

Grace à une proximité culturelle, horaire, géographique, administrative (pas de visas) voire linguistique, la compréhension est bien meilleure, et la flexibilité très forte.

Enfin, il existe un cadre législatif très comparable, car largemement harmonisé (acquis communautaire), entre les différents pays de l’UE, et la circulation des capitaux peut se faire sans entraves.

Les limites du nearshore hors Europe

Bien sur ce qui a été évoqué au dessus ne concerne pas complètement les pays nearshore du Maghreb, qui ont des législations bien spécifiques, parfois un rythme spécifique comme en Algérie (WE décalés), et peuvent souffrir d’une assez grande instabilité politique et administrative, depuis la révolution de jasmin en Tunisie, et depuis quelques mois aussi en Algérie.

 

En conclusion, au niveau « macro », le bloc européen doit avoir le courage de se concentrer sur l’essentiel pour pouvoir le sauvegarder. L’euro devra probablement être refondu pour devenir plus viable, et la commission devra abandonner certaines prérogatives de manière à revenir à plus de subsidiarité au profit de l’échelon national qui est aussi celui au niveau duquel la démocratie peut s’exercer pleinement.

Au niveau des entreprises, l’allongement récent des délais moyens de paiement que certains notent est aussi un signe que les entreprises doivent régir pour ajuster leurs coûts.

Enfin, spécifiquement sur le nearshore, je garde en tête la formule d’un confrère : “Le nearshore, ça marche toujours…”. Mon interprétation est que quand l’économie se contracte, l’aspect coût devient décisif, favorisant le nearshore du fait des réductions de coût qu’il permet, et quand la croissance repart, le développement en nearshore devient avant tout une solution pour accroître les ressources disponibles.